Rapport d’activités 2021

Je relis le rapport d’activités 2020 et il me semble qu’à quelques détails près, je pourrais sensiblement rédiger la même chose tout en demeurant fidèle au déroulement de l’année 2021. À première vue, cela ne m’encourage pas beaucoup. Avons-nous fait du sur-place? Qu’en est-il des voeux pieux énoncés à la fin du rapport? Où en sommes-nous dans la réorganisation administrative de l’organisme? Encore en octobre 2021, nous jonglions avec l’option de fermeture sous la contrainte financière excessive. Contrainte suffisamment forte pour en dissuader certains de poursuivre la route avec nous. Nous sommes encore là mais à quel prix? Et pour combien de temps encore? D’aucuns diront que c’est bien beau avoir la foi mais concrètement, les dettes s’accumulent! Objectivement parlant, il est clair qu’à la lecture des états financiers, le tableau est plutôt sombre : aucun indice nous laissant espérer un minimum de viabilité. Et pourtant…je vais tenter de relever des aspects positifs qui nous invitent à ne pas baisser les bras. Est-ce que ce sera suffisant pour maintenir votre confiance en ce beau projet dont je ne suis qu’un instrument pour l’amener à bon port? À vous de voir!

Embauche d’une adjointe administrative

Devant le débordement de la responsable face aux tâches administratives, la Fondation Béati nous a suggéré l’embauche d’une adjointe administrative, ce qui a été fait début janvier 2021 grâce à l’approbation de notre demande de consolidation. De multiples organismes, entreprises et municipalités ont pu ainsi être sensibilisés à la mission de Val d’Akor et invités à contribuer à son essor soit par un don ou par l’achat de ses produits, notamment les nichoirs pour encourager la gent ailée à revisiter nos territoires ruraux et urbains. À la suite de ces contacts et suivis, notre objectif de ventes de nichoirs et d’abris de chauves-souris a été atteint; plusieurs lieux publics gérés par les municipalités environnantes ou des organismes à but non lucratif ont installé de ces nichoirs, alimentant la fierté des jeunes ayant contribué à leur fabrication. Cependant, aucune aide financière substantielle n’est survenue conséquemment à ces démarches. Par la suite, les efforts se sont concentrés sur l’élargissement du réseau de ventes des produits du jardin : plusieurs restaurants ont manifesté leur intérêt et l’ajout d’un gros acheteur nous a permis d’écouler facilement certains légumes. Il nous faudra ajuster notre production en fonction de leurs besoins, ce qui pourrait faire bondir nos ventes. Toutefois, très peu de particuliers se sont ajoutés aux clients habituels.

Outre le suivi de ces différents contacts, les tâches de l’adjointe administrative se sont réparties entre tous les dossiers administratifs pertinents pour compléter la demande d’obtention du statut d’organisme de bienfaisance, notamment la rédaction de nos règlements généraux; ces derniers ont finalement été approuvés par le conseil d’administration et lors de notre première assemblée générale annuelle qui s’est tenue à la fin novembre 2021.

Démarches de financement

Parallèlement à la recherche de financement et de nouvelle clientèle, nous avons soumis un projet dans le cadre du volet 3.3 du programme Prime-Vert en lien avec la santé des sols et les cultures de couverture mais tout ce travail n’a abouti à rien, la demande d’aide financière ayant finalement été acceptée en avril mais alors, il était trop tard pour monter le dossier technique. Démarche longue et fastidieuse pour répondre aux critères du MAPAQ tout en respectant notre

option d’approches culturales sans aucun travail du sol. La démarche acceptée stipulait le travail du sol sur 80 % des parcelles en essais, alors que nous visons le contraire, ayant laissé nos parcelles en jachère afin de rétablir la vie dans le sol, d’améliorer sa structure et d’augmenter sa fertilité. Le respect des critères du programme présente plusieurs incohérences avec notre approche : pourrons-nous malgré tout satisfaire ces conditions tout en priorisant le non-travail du sol?

Dans le même laps de temps, nous avons amorcé une démarche de sociofinancement sur la plateforme La Ruche afin d’acquérir le financement pour l’achat d’une tondeuse-broyeuse à fléau avec conducteur marchant et d’une remorque pour le transport de matières organiques ou de légumes. Puisque le plateau de travail de Val d’Akor s’adresse à des jeunes, nous serions admissibles au Fonds Mille et Un permettant de doubler la somme recueillie si nous atteignons notre objectif de campagne. Mais voilà, les mois de mai et juin sont arrivés sans que nous puissions finaliser la démarche. Nous espérons donc la compléter cet hiver pour une campagne de financement au printemps.

Emplois d’Été Canada

Comme par les années passées, une demande de subvention a été soumise dans le cadre du Programme Emplois d’Été Canada du gouvernement fédéral, soit l’embauche de quatre jeunes. Nous avons reçu une réponse favorable à hauteur de plus de 15 000 $ pour l’embauche de 2 jeunes pendant 11 semaines à 24 h/s à partir de mai et 2 autres jeunes durant les vacances scolaires pour une période de 8 semaines à 30 h/s. Grâce à la pandémie, les conditions d’embauche étaient beaucoup plus flexibles que par les années passées, ce qui nous a été particulièrement favorable puisqu’après avoir été confrontés à des difficultés d’embauche, nous avons dû assumer le départ ou l’instabilité de certains jeunes avant la fin de l’emploi. Finalement, puisque Val d’Akor s’engage souvent auprès des jeunes adultes sans emploi à garantir le nombre minimal d’heures pour l’admissibilité au chômage, il a été possible de transférer les heures non travaillées, ce qui évidemment nous a fortement aidé. Et nous avons eu la joie d’accueillir Madame Andréanne Larouche, députée fédérale, pour une visite en lien avec ce programme. Elle a pu rencontrer quelques jeunes de même qu’une famille qui arrivait inopinément. Elle s’est montrée très intéressée par le projet et nous a encouragés à poursuivre.

Activités agricoles

La saison démarre en février avec les semis intérieurs. Cette année, nous avons aménagé une chambre à semis dans le garage adjacent à la maison plutôt qu’au sous-sol, trop froid et trop humide. Deux étagères à semis ont donc été transportées au rez-de-chaussée. Après la période de semis, elles servent également pour l’étalage des légumes. Du garage, il est alors facile de sortir les caissettes de légumes et de fleurs lorsque la température s’y prête pour les rentrer le soir s’il fait trop froid. Et en ouvrant la porte de garage, il est facile de contrôler rapidement l’humidité à l’intérieur. On veut aussi penser ce local pour la manutention et le lavage des légumes de même que pour la vente. Nous avons amorcé un aménagement provisoire qui s’avère jusque-là très fonctionnel.

Ce printemps, nous avons fabriqué plusieurs nichoirs pour répondre à la demande, même jusqu’en mai. C’est une valeur plus sûre que les légumes mais il faut trouver la clientèle.

Quant à la saison agricole proprement dite, aucune surprise si je vous dis qu’elle a été marquée par une sécheresse prolongée, qui a perduré de mai à septembre, avec, en fin mai, un gel tardif sévère qui a brûlé toutes les fleurs des fraisiers et des cerisiers. Une fois les premiers semis effectués, l’arrosage des parcelles occupait une grande partie du travail de la journée. Des parcelles semées ont dû être négligées; nous avons limité les surfaces d’ensemencement pour certains légumes exigeants en eau, notamment les laitues et le mesclun; et après un premier semis avorté par la sécheresse, les semis de plusieurs légumes-racines ont été retardés jusqu’au début août. Malgré tout, nous avons quand même réussi à augmenter nos ventes de légumes de plus de 30 %, mais nous avons enregistré une baisse dans la vente d’oeufs et une chute majeure dans la vente de petits fruits, ce qui réduit la hausse des ventes de produits agricoles à environ 9 %. Toutefois, avec les ventes de nichoirs, nous enregistrons une hausse totale des revenus agricoles de près de 25 %. Tableau qui paraît encourageant mais loin d’être satisfaisant. Nous accusons un manque à gagner d’environ 15 000 $ par année selon les prévisions budgétaires.

Quant à la qualité de nos sols, il reste encore beaucoup à faire pour atteindre un niveau de productivité adéquat sur la plus grande partie des surfaces cultivées. La semelle de labour demeure toujours bien présente en plusieurs endroits et advenant des pluies torrentielles, plusieurs parcelles seront inondées.

Cependant, fait encourageant, les parcelles occultées sans travail du sol nous ont offerts des rendements très appréciables et ce, sans fertilisation : nous avons récolté des citrouilles de plus de 35 lbs, avec uniquement quelques arrosages généreux et un paillis de vieux foin. Encore, au printemps, lors des premiers semis, alors que le sol était humide, nous hésitions presque à tracer les rangs de peur de déranger tous les vers de terre qui foisonnaient. Les étapes de préparation des sols sans les travailler augmentent leur teneur en matière organique et leur fertilité : nous pouvons le constater sur plusieurs parcelles. Mais à chaque année, on se dit que l’on doit doubler la production, sans y arriver. Changements climatiques, oui, mais on devra s’y adapter… et rapidement! Notre survie en dépend…

Le plateau de travail a permis d’accueillir cette année sept jeunes incluant trois ados pour une masse salariale de plus de 32 000 $ dont environ la moitié des coûts a été assumée par Emplois d’Été Canada. En comparaison, les revenus agricoles atteignent à peine 50 % de cette somme. Nous espérons chaque année des conditions météorologiques propices au jardinage mais en aurons-nous encore? Il est urgent que nous accélérions le processus de régénération de la santé des sols et de leur résilience aux changements climatiques. À cette fin, nous avons soumis un projet à l’Assemblée des Évêques Catholiques du Québec dans le cadre d’un de leurs objectifs visant la sauvegarde de la maison commune. Ce projet a été accepté et consiste à créer un réseau d’approvisionnement en résidus végétaux.

Activités de financement

De façon à combler notre déficit récurrent dans la production de légumes, il nous faut organiser des activités de financement, peut-être un peu à la manière des campagnes de financement de Caritas alors que des produits sont proposés pour un don possible de 5 $. On l’a fait timidement cette année avec la vente de caissettes de fleurs et de légumes mais on pourrait

élargir cette action à d’autres produits : ail, cartes de voeux, signets. Je crois que c’est une avenue prometteuse à explorer.

La Marche de l’Espérance demeure une piste intéressante mais elle demande une organisation encore plus soutenue. Cette année, elle a rapporté plus de 6 000 $ grâce à l’implication généreuse de quelques personnes qui ont sensibilisé leur milieu de façon significative. Environ une trentaine de marcheurs ont participé à la marche dont plusieurs jeunes qui ont terminé le parcours, y compris avec un bébé de quelques mois!

Les activités communautaires, notamment les Portes ouvertes, ont encore cette année été suspendues à cause de la pandémie qui perdure.

Remerciements

Sans tous les nommer, je tiens à adresser mes remerciements les plus chaleureux aux différentes entités et aux particuliers qui continuent à nous encourager et apporte leur soutien financier : notamment la Corporation archiépiscopale de Sherbrooke à travers son fonds pour la mission sociale, Caritas Estrie qui chaque année nous remet un montant pour du matériel, l’entreprise locale Millette & Fils, fidèle à son engagement et qui nous encourage à persévérer, de même que le Réseau des Églises vertes qui a enregistré une vidéo sur Val d’Akor pour leur chaîne YOU TUBE. Et bien sûr, les subventions accordées par le Programme d’Emplois d’Été Canada et la Fondation Béati non seulement nous aident mais contribuent de façon colossale à maintenir nos activités.

Merci également aux particuliers qui consentent des prêts sans intérêts pour nous permettre de poursuivre la route, faisant fi des risques encourus, parce qu’ils y croient.

Finalement, à vous tous et toutes qui, par votre encouragement sous toutes ses formes, bénévolat, dons, achats, prières, présence réconfortante, nous soutenez, je ne peux que vous exprimer toute ma reconnaissance et ma gratitude, car c’est ensemble que nous pourrons assurer la réussite de Val d’Akor.

Perspectives pour 2022

Pour cette année 2022 qui commence, plusieurs jalons sont posés. Avec la finalisation des règlements généraux, nous disposons d’un guide pour compléter la demande de statut d’organisme de bienfaisance, en souhaitant qu’elle soit acceptée, ce qui ouvrirait la porte à l’émission de reçus de charité pour les donateurs.

Côté agricole, l’apport massif de résidus végétaux nous permettra de préparer d’autres parcelles pour les cultures et nourrira nos sols. Même si cette étape nécessite au moins un an, une planification méticuleuse des jardins sur les parcelles actuelles en fonction des besoins de nos principaux acheteurs en gros nous permet d’envisager une hausse significative des revenus, d’autant plus qu’il nous sera possible de couvrir nos sols, ce qui contribuera à atténuer les conséquences des extrêmes de température. Les ravageurs de toutes sortes demeurent une menace et il nous faudra se montrer vigilants. La mise en marché constitue un défi et il sera essentiel d’adopter une méthode de travail plus efficace, d’où l’importance de trouver du

financement pour les améliorations locatives ainsi que pour l’achat et l’installation d’équipement plus fonctionnel.

Au niveau administratif, il est impératif de libérer du temps à la responsable actuelle afin d’accélérer le traitement des dossiers, déployer des énergies dans la recherche de financement et de partenariat, consolider les réseaux de ventes et de soutien financier. Un travail en équipe avec certains bénévoles et/ou membres du conseil d’administration rendront les tâches moins ardues et plus stimulantes. Il faudra par ailleurs poursuivre notre effort de visibilité dans le milieu, mettre en ligne notre propre site WEB et donner suite aux multiples contacts déjà interpellés par notre adjointe administrative.

Finalement, des ateliers de croissance personnelle à partir de la symbolique de l’argile sont offerts à quelques jeunes depuis le 16 octobre et nous comptons les poursuivre.

Conclusion

À travers ce tableau que j’ai brossé de nos activités et enjeux majeurs, faut-il encore espérer? Si je m’attarde à considérer la mission de l’organisme et les objectifs qu’il vise tels que décrits dans nos règlements généraux, je constate tout de même que nous avons emboîté le pas et que malgré tout, nous avançons résolument dans la bonne direction. Les activités énumérées plus haut ne sont pas exhaustives. Pour bien mesurer l’impact de notre action, je ne peux taire les nombreuses heures consacrées à l’accueil et l’écoute de jeunes qui recherchent des balises pouvant les guider vers la pleine réalisation d’eux-mêmes; je m’émerveille au quotidien devant leur motivation au travail qui grandit et leur adhésion de coeur à ce projet qui les stimule et les ancre sur l’essentiel et le respect de la nature; je m’épate devant la capacité de nos sols et de nos écosystèmes à se regénérer tout en insufflant la vie à tous ceux et celles qui les contemplent et les respectent. Combien d’enfants visitent les lieux, cajolent les poules, observent la nature et rechignent à l’idée de quitter les lieux? Et qu’en est-il des adultes, clients, visiteurs, bénévoles ou amis qui trouvent ici une oasis de paix?

Certains dossiers traînent, vrai! Nous ne sommes pas encore organisés, toujours dans le débarras avec des infrastructures quasi inexistantes ou non fonctionnelles, vrai! Il faudra encore des années avant de restituer la santé des sols et des écosystèmes, encore vrai! Mais nous sommes en route, debout et confiants. Les valeurs véhiculées par Val d’Akor rejoignent sans contredit les laissés-pour-compte de nos sociétés, questionnent et en interpellent d’autres. L’approche agroécologique que nous défendons n’a toujours pas fait ses preuves ici, du moins aux yeux des observateurs distants, mais s’impose de plus en plus mondialement comme solution privilégiée face aux menaces des changements climatiques. Pour les habitués de Val d’Akor, quelle joie profonde exprimée à notre endroit lorsqu’après une période d’incertitude devant notre avenir, ils apprennent que nous poursuivons la route. Signe que Dieu nous accompagne…? Je vous laisse répondre selon votre perspective. Pour moi, ce projet fou, trop gros, trop grand, ne m’appartient pas; je n’en suis qu’un instrument, comme bien d’autres d’ailleurs, et j’ose encore y croire et espérer!

Je ferai du Val d’Akor une porte d’espérance (Osée 2, 17).

Cécile Delisle
30 décembre 2021